Le Comité prend note des informations figurant dans le rapport de la France. Ce rapport ne fait pas état de modifications concernant les dispositions générales sur le temps de travail.
Le Comité rappelle qu'aux termes du code du travail, la durée légale du travail est fixée à 35 heures par semaine. Les salariés peuvent, à la demande de l’entreprise, travailler au-delà de cette limite ; les heures ainsi effectuées sont considérées comme des heures supplémentaires. Le nombre maximum d’heures supplémentaires autorisées par an est de 220. La durée hebdomadaire de travail maximale, y compris les heures supplémentaires, calculée sur douze semaines consécutives ne peut dépasser 44 heures et au cours d’une même semaine ne peut dépasser 48 heures (Conclusions 2003).

Les règles précitées ne s’appliquent pas aux cadres dirigeants, ni aux cadres relevant d’une convention de forfait annuel en jours ou en heures. Le Comité considère que le fait d’exclure les cadres dirigeants des règles générales est justifié, compte tenu de la nature de ces postes. Pour les cadres relevant du système d’annualisation des jours de travail, il a cependant estimé que la situation n’était pas conforme à la Charte, au motif que la durée hebdomadaire de travail autorisée était excessive et que les garanties juridiques offertes par le système de conventions collectives étaient insuffisantes.

Le rapport souligne que la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail a modifié sur un certain nombre de points le système d’annualisation des jours de travail. Elle prévoit ainsi un nombre total de 235 jours en l’absence d’accord collectif ; elle fait également obligation à l’employeur d’organiser chaque année un entretien individuel avec chaque salarié et de consulter le comité du personnel. Sont habilités à conclure des accords de ce type les cadres qui disposent d'une certaine autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps et les salariés non-cadres dont les horaires de travail ne peuvent être déterminés à l’avance et qui jouissent d’une réelle autonomie. Les périodes de repos applicables à cette catégorie de travailleurs n’ont pas changé, à savoir un repos quotidien minimum de onze heures et une repos hebdomadaire de vingt-quatre heures.

Le Comité se réfère aux décisions du 24 juin 2010 sur le bien-fondé des réclamations Confédération française de l’Encadrement (CFE-CGC) c. France (n° 55/2009) et Confédération générale du Travail (CGT) c. France, (n° 56/2009), où il a de nouveau dit que le temps de travail maximum (78 heures par semaine) pour les cadres soumis au régime de forfait annuel en jours était manifestement excessive et ne pouvait pas en conséquence être qualifiée de raisonnable au sens de l’article 2§1 de la Charte révisé1. Il a également noté que la loi du 20 août 2008 n’impose pas que les conventions collectives prévoient une durée maximale, journalière et hebdomadaire.
Ceci est désormais essentiellement traité à l’occasion d’un entretien annuel d’un travailleur avec son employeur (article L. 3121-46) et d’une consultation annuelle du comité du personnel (article L.2323-29). Le Comité considère que, de ce fait, la procédure de négociation collective n’offre pas de garanties suffisantes pour que l’article 2§1 soit respecté.

Dans sa conclusion précédente (Conclusions 2007), le Comité a constaté un second motif de non conformité, à savoir que les astreintes durant lesquelles aucune travail effectif n’était réalisé étaient assimilées à des périodes de repos. Le rapport donne quelques précisions sur les modalités d’application de la réglementation relative aux astreintes. Il indique notamment qu’en vertu de la circulaire DRT 2003-03, un même salarié ne peut être systématiquement placé en situation d’astreinte et que, si une telle pratique était constatée, il appartiendrait aux services de contrôle de le signaler à l’Administration. Le Comité rappelle que toute astreinte doit donner lieu à une compensation, financière ou sous forme de repos.
Le Comité se réfère a la décision sur le bien fondé de la réclamation Confédération générale du Travail (CGT) c. France (n° 55/2009), où il a de nouveau dit que l’assimilation des périodes d’astreinte au temps de repos constitue une violation du droit à une durée raisonnable du travail prévue par l’article 2§1 de la Charte révisée.

Conclusion :
Le Comité conclut que la situation de la France n’est pas conforme à l’article 2§1 de la Charte révisée pour les motifs suivants:
  • la durée hebdomadaire de travail autorisée pour les cadres soumis au régime de forfait annuel en jours est excessive et les garanties juridiques offertes par le système de conventions collectives sont insuffisantes;
  • les astreintes durant lesquelles aucun travail effectif n’est réalisé sont assimilées à des périodes de repos.